Louis Langrée et l’Orchestre des Champs Élysées donnent un concert Bizet / Saint-Saëns magistral au Théâtre Auditorium de Poitiers

 


Au moins une fois par saison le chef d’orchestre Louis Langrée, nouvellement nommé directeur général de l’Opéra Comique (https://lyriqueinfo.blogspot.com/2021/10/le-chef-dorchestre-louis-langree-nomme.html), dirige un concert de musique française. Si en 2020 et en 2021 nous avons été privés de ces moments de grâce, le concert de la saison 2021/2022 a bien eu lieu devant une salle très bien remplie. Pour ce concert exceptionnel, les responsables de la phalange ont invité la jeune et brillante violoniste moldave Alexandra Conunova.



C’est avec
l’Arlésienne – suite N°1 – de Georges Bizet (1838-1875) que commence le concert. Visiblement très en forme, Louis Langrée dirige l’Orchestre des Champs Élysées avec un dynamisme peu commun ; la battue est ferme, vive, claire, nette, précise et les départs sont donnés au cordeau. Chaque thème de cette première suite de l’arlésienne est ciselée avec un art consommé même si j’ai regretté que le début du chef d’œuvre de Bizet ait été parfois un peu rapide. Cela étant dit la lecture de l’Arlésienne par Louis Langrée n’en est pas moins exceptionnelle et le chef d’oeuvre de Bizet est remarquablement servi par cet excellent chef d’orchestre qui démontre une fois de plus qu’il est un grand spécialiste de la musique française. Carmen est donnée et redonnée partout dans le monde mais le chef d’œuvre de Bizet est toujours aussi populaire et vendeur (rappelons qu’à la création Carmen fut un échec abyssal et que seul un critique, Piotr Illich Tchaïkovsky (1840-1893), en vit tout le potentiel et annonça le succès planétaire qui est encore le sien de nos jours) ; cela étant dit, ce sont des extraits des suites composées par Bizet à partir de son opéra qui nous sont proposés en ce mercredi soir. Et l’interprétation de Louis Langrée et de l’Orchestre des Champs Elysées est d’autant plus réjouissante que chacun joue ces suites avec un engagement total. C’est aussi l’occasion de découvrir les chefs de certains pupitres (flûtes, trompettes, hautbois par exemple) qui ont une occasion magnifique de donner un bel aperçu de leur talent.



Si en 2021 on a fêté avec éclat le centenaire de la disparition de Camille Saint Saëns (1835-1921), il reste un compositeur très présent sur le devant de la scène. Si l’on connaît plutôt bien la musique opératique de Saint Saëns, notamment grâce à Samson et Dalila, on connaît moins bien sa musique instrumentale. C’est donc une excellente occasion de découvrir deux pièces de très belle facture de ce compositeur ; pour ces deux œuvres, c’est Alexandra Conunova qui a été invitée à en interpréter les parties solistes. C’est d’abord le concerto pour violon et orchestre N°3 en si mineur qui « ouvre le bal » et ce que l’on remarque d’emblée c’est que Saint Saëns a composé une œuvre particulièrement difficile et très exigeante pour tous les artistes présents sur scène. On remarque également que la soliste est sollicitée en permanence et a de rares moments de « pause » ; si cela nous permet de remarquer la virtuosité exceptionnelle d’Alexandra Conunova, c’est aussi l’occasion de noter que la jeune femme joue son violon avec un style très fluide, aérien qui permet de se focaliser sur la si belle musique de Saint Saëns ; elle tire d’ailleurs de son instrument des sons séduisants qui passent la rampe sans difficulté. Dès les premières notes du chef d’œuvre de Saint Saëns, Louis Langrée dirige d’une main ferme, nerveuse. La battue carrée et dynamique de Langrée booste ce concerto dont, la musique explose tel un feu d’artifice géant. Avec l’Introduction et Rondo Capriccioso en la mineur on passe dans un univers totalement différent. Si Mlle Conunova est un peu moins sollicitée, sa partition n’en est pas moins complexe et tout aussi piégeuse que le concerto ; néanmoins, l’interprétation de cette œuvre, charmante au demeurant, est de très belle tenue. Louis Langrée, toujours aussi inspiré, donne une lecture certes sobre mais dynamique et sans temps morts ; quant à l’Orchestre des Champs Elysées suit son chef du jour avec une précision milimetrée.


C’est un nouveau très beau concert que l’Orchestre des Champs Elysées a donné en ce froid mercredi de février. Et la baguette ferme, nerveuse, dynamique de Louis Langrée contribue pour beaucoup au grand succès de cette soirée ; Nous tenons aussi à saluer l’excellente violoniste Alexandra Conunova dont le talent a ensoleillé l’auditorium de Poitiers.


Compte rendu, concert. Poitiers. Auditorium, le 2 février 2022. Georges Bizet (1838-1875) : L’arlésienne, suite N°1 ; Carmen, extraits des suites N°1 et 2 (ouverture, les toréadors, aragonaise, la garde montante, intermezzo, séguedille, les dragons d’Alcala, danse bohème) ; Camille Saint-Saëns (1835-1921) : concerto pour violon et orchestre N°3 en si mineur opus 61, Introduction et Rondo Capriccioso en la mineur opus 33. Bis : Eugène Ysaÿe (1858-1931) : sonate pour violon N°2 extrait du 1er mouvement (bis N°1) ; Georges Bizet (1838-1875) : Carmen - air d’Escamillo - (bis N°2). Alexandra Conunova, violon ; Orchestre des Champs Élysées ; Louis Langrée, direction.

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