Achante et Céphise : Les ambassadeurs – La grande écurie sortent une nouvelle version de cette pastorale méconnue de Jean Philippe Rameau

 







Oeuvre de commande composée en 1751 pour célébrer la naissance du duc de Bourgogne, premier petit fils de Louis XV, la pastorale « Acanthe et Céphise » de Jean Philippe Rameau (1683-1764) est immédiatement tombée dans l’oubli, comme tant d’autres œuvres de circonstance pour ne ressortir des placards ou elle sommeillait qu’en … 1983. Cette nouvelle version au disque d’Achante et Céphise, gravée plus de deux cent soixante dix ans après la « naissance » de cette pastorale de Rameau, par Alexis Kossenko et son orchestre réunit une distribution talentueuse menée tambour battant par un Cyrille Dubois et une Sabine Devieilhe en grande forme.



Si Achante et Céphise n’est pas un chef d’œuvre, à l’instar d’Hippolyte et Aricie, Platée ou encore Castor et Pollux il n’y en a pas moins de très belles pages auxquelles les artistes, solistes, chœur, orchestre rendent justice avec enthousiasme et talent. Cyrille Dubois, incarne un Achante de très belle tenue ; j’apprécie la belle voix de haute contre du jeune homme qui donne le meilleur de lui même pour ressusciter ce rôle. Dès les premières mesures, Dubois donne le ton de la soirée : elle sera sous le signe du courage, du dévouement et de l’amour ; si les deux amants n’ont pas d’airs propres, les duos d’amour sont interprétés avec talent et beaucoup de délicatesse ; Cyrille Dubois ne fait qu’une bouchée d’Achante qui, sans être un Hippolyte en puissance, est un jeune homme attachant. Sabine Devieilhe donne la réplique avec talent à Cyrille Dubois et campe une Céphise tendre et craintive mais déterminée à obtenir ce qu’elle veut : rester auprès de son bien aimé Achante. Si la jeune femme redoute Oroès, le génie qui la poursuit de ses assiduités, jamais elle ne dévie de sa route. La voix ferme et affirmée de Sabine Devieilhe donne à Céphise des accents frémissants d’amour, de dégoût de rejet mais aussi d’espoir. Dans toute histoire d’amour il y a une bonne fée et un méchant ; c’est Judith Van Wanroij qui campe avec talent « la fée » Zirphile. La soprano néerlandaise assume avec une belle autorité un rôle dont la difficulté n’a rien à envier à celle des deux héros ; vocalement c’est une interprétation sans faiblesse que nous propose Judith Van Wanroij dont la belle voix de soprano, parfaitement maîtrisée, claque avec assurance. Le jeune baryton français David Witczak incarne le génie Oroès – le méchant de l’histoire – ; j’apprécie la belle voix de baryton du jeune homme qui donne à son personnage toute la méchanceté et la noirceur qu’il exige. Amoureux de Céphise, il ne supporte pas qu’elle lui résiste ; Oroès ne comprend pas qu’elle le repousse, lui – un immortel – au profit d’Achante, un simple mortel et dans sa jalousie sans égale, il menace avec une morgue et une arrogance que Witczak, très crédible et tout aussi survolté que ses collègues, rend parfaitement. L’ensemble des rôles secondaires est tenu avec brio par des artistes méritants, surmotivés par le défi que représente cette recréation, talentueux. Quant au chœur, parfaitement préparé par Olivier Scheenbeli, son chef, il fait honneur à Rameau en interprétant la partition qu’il lui a écrite avec brio et sans faiblesses. L’orchestre Les ambassadeurs – la grande écurie, dirigé par Alexis Kossenko sert la musique de Rameau avec talent. Kossenko, très en forme cisèle chaque note tel un orfèvre et dès l’ouverture il prend les choses en main ; sa direction est ferme, nerveuse, précise, sans fioriture. Cet orchestre, né de la fusion de deux formations suite au décès de Jean Claude Malgoire, rend parfaitement justice à la très belle musique de Rameau, qui même s’il n’a pas composé un chef d’oeuvre a composé une belle œuvre qui, lors de sa création, a célébré avec honneur la naissance du bébé royal.


On ne peut que saluer le très beau travail de recherche mené en amont de cet enregistrement très important qui marque la renaissance d’une œuvre oubliée depuis près de trois cent ans. Alexis Kossenko et l’ensemble des artistes réunis pour l’occasion ont donné le meilleur d’eux même et rendent justice à Jean Philippe Rameau en redonnant vie à Achante et Céphise.


Compte rendu, CD – opéra. Jean Philippe Rameau (1683-1764) : Achante et Céphise ou la sympathie. Pastorale héroïque en trois actes sur un livret de Jean François Marmontel (1723-1799). Cyrille Dubois, Acanthe ; Sabine Devieilhe, Céphise ; David Witczak, le génie oroès ; Judith Van Wanroij, Zirphile ; Jehanne Amzal, la grande prêtresse ; Artavazd Sargsyan, un coryhée, un berger ; Arnaud Richard, un coryphée, un chasseur ; Marine Lafdal-Franc, une fée, une bergère ; Anne Sophie Petit, la deuxième prêtresse, Délie ; Floriane Hasler, la troisième prêtresse. Les chantres du Centre de musique baroque de Versailles – Olivier Scheenbeli, chef de choeur ; Orchestre Les Ambassadeurs – La grande écurie ; Alexis Kossenko, direction. 2 CDs – Érato

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