L'Orchestre des Champs Élysées débute sa saison 18/19 avec un programme Mozart
Après
un été bien rempli, l'Orchestre des Champs Élysées revient au
Théâtre Auditorium de Poitiers en compagnie du Collegium Vocale
Gent et de quatre solistes talentueux pour un concert entièrement
consacré à Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791). On ne présente
plus le célébrissime requiem que Philippe Herreweghe a enregistré
à deux reprises avec le Collegium Vocale Gent et l'Orchestre des
Champs Élysées. Bien connue également la «Jupiter», l'ultime des
symphonies que composa Mozart et qui est la seconde œuvre au
programme de ce concert exceptionnel. Pour interpréter ce requiem,
Philippe Herreweghe a invité un très beau quatuor de solistes. On
notera aussi, dans ce quatuor, la présence de la jeune mezzo soprano
française Eva Zaïcik couronnée «révélation lyrique» lors des
victoires de la musique classique 2018.
Juste
avant le début du concert, alors que l'orchestre et le collegium
vocale gent sont installés, Philippe Herreweghe, visiblement très
en forme, s'avance et, après une rapide présentation de la
symphonie N°41 «Jupiter», fait une présentation très pédagogique
du requiem de Mozart et rend au passage un bel hommage aux enfants
venus en nombre, que ce soit en famille ou avec leurs professeurs,
pour une soirée exceptionnelle. Clair dans son propos, Philippe
Herreweghe n'hésite pas à le démontrer par l'exemple avec des
extraits de l'Introït, du Dies Irae, du Tuba Mirum (donné au
trombone) … Philippe Herreweghe aime tout particulièrement
l'ultime chef d’œuvre de Mozart, au point de l'avoir enregistré à
deux reprises avec le Collegium Vocale Gent et l'Orchestre des Champs
Élysées, le classe à part dans la tant il est «terriblement
humain» et «éloigné de la mort» alors qu'en général «dans la
musique allemande, la mort est très présente». Après une rapide
mise en place du plateau en «mode symphonique», l'Orchestre des
Champs Élysées revient et entame, sous la direction d'un Philippe
Herreweghe survolté, la dernière des symphonies de Mozart,
présentée par Herreweghe comme une œuvre de la «grande maturité».
La Jupiter, ainsi baptisée au XIXe siècle, est en quatre mouvements
parmi lesquels on trouve un menuet, traditionnel au XVIIIe siècle.
Herreweghe dirige avec une telle fougue le premier mouvement, qu'à
plusieurs reprises il semble sur le point de descendre du podium pour
donner ses départs au pupitre des violoncelles. Si Herreweghe
s'assagit par la suite sa direction est toujours aussi rigoureuse,
millimétrée, souple et le menuetto, le troisième mouvement, donne
envie de se lever et de danser au son de l'orchestre.
Au
retour de l'entracte, l'Orchestre des Champs Élysées et le
collegium Vocale Gent s'installent pour le requiem. L'ultime chef
d'oeuvre de Mozart, achevé par son élève et ami Anton Sussmayer,
est l'un des chevaux de bataille de Philippe Herreweghe qu'il donne
régulièrement en concert et a enregistré à deux reprises avec le
Collegium Vocale Gent, son ensemble historique, et l'Orchestre des
Champs Élysées. Parfaitement préparé, le Collegium Vocale Gent
entame l'Introït sur un pianissimo parfaitement audible dans un
auditorium comble. Le tempo et les nuances adoptés par Philippe
Herreweghe donnent à cette nouvelle version du requiem un charme
réel sans pour autant trahir le chef d’œuvre de Mozart qui avait,
à sa mort, laissé des indications précises sur certains numéros
parfois largement esquissés ; quant aux autres numéros, ceux qu'il
n'avait pas eu le temps de commencer, c'est Sussmayer qui les a
composé, tout en respectant à la lettre le style et l'esprit de son
maître. Le quatuor invité pour l'occasion ne manque pas de panache.
Si nous apprécions les quatre voix, quel dommage que les solistes
soient placés derrière l'orchestre et non aux côtés du chef.
Concernant les voix masculines, elles sont toutes deux parfaitement
maîtrisées avec une ligne de chant impeccable, des voix larges,
fermes et des tessitures adéquates au répertoire mozartien qu'on
sait redoutable. Et même si on regrettera une hésitation du ténor
Maximilian Schmitt sur un départ mal maîtrisé nous apprécions
d'entendre un chanteur qui connaît bien son Mozart. Le duo féminin
séduit d'entrée de jeu ; la voix aérienne, ferme et parfaitement
maitrisée d'Emôke Baràth envahit un auditorium si attentif que
l'on aurait pu entendre une mouche voler. La jeune mezzo soprano Eva
Zaïcik justifie grandement la confiance que lui a accordée Philippe
Herreweghe en l'invitant pour la tournée de neuf concerts qui
débutait à Poitiers en ce jeudi soir. La jeune femme ne tremble pas
face aux pics d'une partition apparemment simple mais terriblement
exigeante.
Pour
un début de saison, l'Orchestre des Champs Élysées, le Collegium
Vocale Gent et Philippe Herreweghe ont frappé très fort en donnant
devant une salle comble un programme Mozart quasi parfait. Même si
le requiem est une de ses œuvres les plus données, Herreweghe en
donne une lecture sobre et très forte. On soulignera la présence de
nombreux jeunes venus en famille ou avec leurs professeurs soucieux
de partager un grand moment de culture avec un chef en grande forme
et très enjoué qui a su se montrer très pédagogue avec une
présentation claire et précise du requiem en début de concert.
Compte
rendu, concert. Poitiers. Auditorium, le 18 octobre 2018. Wolfgang
Amadeus Mozart (1756-1791) : requiem, symphonie N°41 «Jupiter».
Emôke Baràth, soprano ; Eva Zaïcik, mezzo soprano ; Maximilian
Schmitt, ténor ; Florian Boesch, baryton ; Collegium Vocale Gent,
Orchestre des Champs Elysées. Philippe Herreweghe, direction.
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