Un beau concert de l’ensemble Les musiciens de Saint Julien et Tim Mead à l’auditorium de Poitiers
Une belle voix au service de Purcell
Dès le début de la soirée, j’ai apprécié la judicieuse alternance entre les « chansons » ou airs de cour et les danses. Tim Mead ouvre la soirée avec « O solitude », une mélodie accompagnée à la basse continue. La voix est belle, ferme, peinant parfois à passer la rampe de l’auditorium – peu propice aux voix – mais idéal pour la musique ; cela étant dit, Mead rend justice à Purcell avec talent. Compositeur central de la musique baroque anglaise Purcell trouve là un avocat des plus talentueux quoi que certaines des mélodies choisies pour ce concert soient un peu lentes ; j’aurais aimé écouter, en plus de ces airs de cour, des extraits de Didon et Enée, son seul opéra, ou des semi opéras qu’il a laissé à la postérité. Car en effet, il nous a délivré une excellente interprétation de l’air du froid « What power art thou » extrait de King Arthur (composé en 1691). Les musiciens de Saint Julien accompagnent Tim Mead avec une belle délicatesse que se soit la basse continue ou l’ensemble au complet ; la direction de François Lazarevitch, installé au milieu des musiciens, est d’une discrétion remarquable mais ferme et nerveuse.
Des danses de cour interprétées avec brio
Mais l’ensemble ne fait pas qu’accompagner Tim Mead au cours de cette belle soirée. Il interprète aussi des danses de cour qui alternent avec les airs chantés par le contre ténor anglais. Ces danses sont interprétées avec un « peps » et une bonne humeur réjouissants ; c’est aussi l’occasion de voir les musiciens utiliser différents instruments. Ainsi Elsa Papasergio joue avec talent aussi bien du hautbois que de la flûte à bec, tandis que François Lazarevitch joue toutes les flûtes qu’il a disposé sur la table installée derrière les musiciens ; mais l’instrument le plus surprenant est bien la musette que Lazarevitch joue à deux reprises pendant le concert. Proche de la cornemuse et du bignou, elle est plus légère que ces deux derniers instruments car elle n’en a pas la poche que l’instrumentiste coince sous son bras. Lazarevitch dirige l’ensemble depuis son pupitre ; les départs sont donnés d’un simple regard et, parfois d’un geste de la main. La direction est ferme, dynamique, nerveuse et chacun suit son chef avec une précision millimétrée. Avec Les musiciens de Saint Julien, la musique de Purcell a là un de ses meilleurs représentants en activité.
Malgré quelques lenteurs dans la partie chantée, j’ai assisté à un concert de très belle qualité. Tim Mead a une belle voix de contre ténor et a fait honneur à Purcell en interprétant les mélodies choisies pour cette tournée avec talent. Quant aux Musiciens de Saint Julien, ils ont donné une vie et un souffle très forts aux danses de Purcell. Le public ne s’y est pas trompé en réservant un accueil enthousiaste aux artistes présents sur le plateau de l’auditorium qui ont concédé deux bis : une chanson de Purcell et une contredanse que Lazarevitch a tiré d’un précédent programme.
Compte rendu, concert. Poitiers. Auditorium, le 16 mai 2023. Henry Purcell (1659-1695) : airs de cour et d’opéra : O solitude, One charming night, here the deities approve, ‘tis nature’s voice, Here let my life, Fairest Isle, What power art thou (extrait de King Arthur), ‘Twas within a furlong of Edinboro’town, Frottez la viole, frottez le luth ; Danses de cour. Tim Mead, contre ténor ; Elsa Papasergio, hautbois et flûte à bec ; Josef Zak et Anaëlle Blanc-Verdin, violons ; Sophie Iwamura, alto ; Etienne Floutier, viole de gambe ; Mathieu Dupouy, clavecin et orgue ; Eric Bellocq, archiluth et cistre, François Lazarevitch, flûtes, musette et direction. Les musiciens de Saint Julien.
Crédit photo Tim Mead : Benjamin Ealovega
Crédit photo Les musiciens de Saint Julien : Jean Baptiste Millot
Commentaires
Enregistrer un commentaire