L’Orchestre des Champs Élysées termine sa tournée à Poitiers avec un programme Haydn / Beethoven

 


Pour une fois, l’Orchestre des Champs Élysées* a terminé sa tournée européenne au Théâtre Auditorium de Poitiers. Le programme présenté contient « Le Christ au mont des oliviers », un oratorio de Ludwig Van Beethoven (1770-1827), forme rare pour ce compositeur. En effet ce genre n’était pas le préféré de Beethoven dont le corpus instrumental est nettement plus fourni. En ce qui concerné Joseph Haydn (1732-1809), le second compositeur au programme de cette soirée, il fut tout aussi prolixe dans tous les styles de musique. Et avec plus de cent symphonies composées tout au long de sa vie, le moins que l’on puisse dire c’est qu’il n’est pas resté inactif. C’est la quarante neuvième d’entre elles, surnommée « La passion », qui nous était proposée en ce chaud mardi soir de mars.



C’est la symphonie N°49 en fa mineur « la passion » de Joseph Haydn (1732-1809) qui ouvre la soirée. Bien qu’elle soit en mode mineur, l’œuvre, en quatre mouvements n’en est pas moins pleine de vie. Si l’adagio est tout doux et interprété avec entrain, c’est le menuet qui retient l’attention, car au XVIIIe siècle il était d’usage qu’il soit « introduit » dans une œuvre « de type » symphonie (Mozart contemporain et grand admirateur de Haydn, suivit, lui aussi, la tradition de l’époque). Et ce menuet, charmant au demeurant est joué avec une rare vivacité par l’Orchestre des Champs Élysées très en forme, bien qu’en fin de tournée. La direction de Philippe Herreweghe est toujours aussi ferme et nerveuse quoi que le geste soit plus économe que d’habitude ce qui surprend ; mais ce dernier concert avec ce programme est peut être marqué du sceau de la fatigue. J’ai néanmoins apprécié la lecture très classe et quasi parfaite du chef belge qui maîtrise son Haydn sur le bout des doigts.


Avec
« Le Christ au Mont des Oliviers » de Ludwig Van Beethoven (1770-1827), la phalange, rejointe par le Collegium Vocale Gent et trois beaux solistes, nous entraîne dans un univers peu connu du compositeur bonnois. Car il nous faut bien reconnaître que l’oratorio est un genre assez rare chez Beethoven ; « Le Christ au mont des oliviers », composé et créé en 1803, a été composé après que Haydn ait montré la voie à son éminent confrère avec La création (1798) et Les saisons (1801). L’orchestre L interprète la partition instrumentale avec panache ; dès l’ouverture, Herreweghe donne le ton : la partition sera interprétée sans temps morts ; les tempos et les nuances adoptés sont quasi parfaits et le Collegium Vocale Gent, parfaitement préparé comme d’habitude, donne de très belles choses à entendre bien que le chœur d’hommes soit plus sollicité que le chœur féminin. La diction est excellente et l’ensemble suit son chef avec une précision millimétrée. Des trois solistes, le plus sollicité est le ténor Sebastian Kholhepp (Jésus). La voix, à l’ample tessiture, est parfaitement maîtrisée. Kholhepp, insolent de santé vocale est un Jésus quasi parfait et les nuances sont superbes et la voix passe la rampe terrible de l’auditorium sans efforts ; La soprano australienne Eleanor Lyons campe un Séraphin de toute beauté. La voix insolente de santé de la jeune femme couvre une tessiture large ; si le médium est bien assuré, les aigus sont éclatants et les arias sont chantés avec une rare maîtrise. Je regrette qu’un baryton comme Thomas Bauer, qui n’est pas un inconnu pour le public poitevin ait accepté de venir pour ne chanter que dans un trio ; ça aurait été l’occasion de permettre à un jeune artiste lyrique, de se mettre en avant malgré la trop brève intervention du baryton.



C’est, une fois de plus, un concert de très belle tenue que l’Orchestre des Champs Élysées a proposé au public poitevin. Si je regrette de n’avoir vu aucun artiste lyrique français pour interpréter l’oratorio de Beethoven, j’admets volontiers que le ténor allemand Sebastian Kholhepp a campé un Jésus superbe sans aucune faiblesse. Quant à Haydn, il n’aurait , sans aucun doute, pas renié la très belle interprétation de l’Orchestre des Champs Élysées de son chef d’œuvre.


Compte rendu, concert. Poitiers. Auditorium, le 22 mars 2022. Joseph Haydn (1732-1809) : symphonie N°49 en fa mineur « la passion » ; Ludwig Van Beethoven (1770-1827) : Le Christ au mont des oliviers opus 85 oratorio composé sur un livret de Franz Xaver Huber (1755-1814). Eleanor Lyons, soprano (Séraphin) ; Sebastian Kholhepp, ténor (Jésus) ; Thomas Bauer, baryton (Pierre). Orchestre des Champs Élysées ; Collegium Vocale Gent ; Philippe Herreweghe, direction.


* Nous sommes heureux de vous annoncer que le violon volé, les archets et la boîte qui les contenait ont été retrouvés et rendus à la phalange.

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