L’orchestre Les siècles célèbre Camille Saint Saëns à Chambord
Alors que le festival de Chambord se poursuit avec succès, nous revenons au château pour assister au concert de l’orchestre Les siècles, fondé et dirigé par François Xavier Roth, qui célèbre le centenaire de la disparition du compositeur Camille Saint Saëns (1835-1921). Pour l’occasion, le chef d’orchestre a invité la violoncelliste Sol Gabetta et son père l’organiste Daniel Roth. C’est Vanessa Wagner qui accueille le public et donne au passage les consignes d’usage ; la pianiste, qui est aussi la directrice artistique du festival, en profite pour remercier l’orchestre et son chef de leur fidélité à la manifestation, en effet ils avaient ouvert la première édition du festival et reviennent pour célébrer son dixième anniversaire.
La soirée débute par l’interprétation de la danse macabre que Saint Saëns composa en 1874 et dont la création eut lieu en janvier 1875. D’entrée de jeu, François Xavier Roth, visiblement survolté et très heureux de reprendre du service, prend les choses en main avec une direction claire, nerveuse, ferme, au cordeau ; on ne peut également que saluer la superbe performance de François Marie Drieux, l’excellent 1er violon de l’orchestre qui interprète les parties solistes de la danse macabre avec talent, classe et subtilité. Quant à l’orchestre, qui suit son chef avec une précision millimétrée, il n’est pas en reste et fait résonner cette danse macabre sous le grand tivoli des mille couleurs de l’arc en ciel.
Après que le plateau eût été aménagé pour permettre à la violoncelliste Sol Gabetta de s’installer, l’orchestre interprète le concerto pour violoncelle et orchestre N°2 en ré mineur. Avec cette toute jeune femme, Saint Saëns trouve là une de ses plus belles et talentueuses interprètes ; en effet on ne peut qu’être surpris par Mlle Gabetta qui, en plus de manier l’archet avec une souplesse et une fluidité inégalables joue de mémoire une partition très virtuose et compliquée. Le chef d’oeuvre de Saint Saëns est interprété tambour battant par le chef dont la direction est toujours aussi dynamique et sans temps mort.
Mais le gros morceau de cette soirée mémorable c’est la symphonie N°3 avec orgue en ut mineur opus 78. Pendant que l’on enlève l’estrade sur laquelle Sol Gabetta était installée, Daniel Roth prend place devant l’orgue en compagnie de son tourneur de pages (un élève ?). La encore, nous écoutons une œuvre somptueuse, très virtuose mais aussi très usante pour les interprètes tant la musique foisonne, explose même par moments. François Xavier Roth, qui est toujours aussi survolté dirige l’orchestre d’une main toujours aussi ferme, donnant les départs avec la même précision millimétrée que précédemment. Les interventions de l’orgue, intégré à l’orchestre, sont interprétées de mains de maître par un Daniel Roth très en forme et ne manquent pas de saveur. Si ce grand artiste n’est pas devant le Cavaillé Col qu’il joue habituellement, rappelons que Daniel Roth est titulaire des orgues de l’église Saint Sulpice (située dans le 6e arrondissement de la capitale), il n’en donne pas moins une très belle leçon de musique grandeur nature. C’est pendant l’interprétation de cette symphonie que sonne la cloche de la chapelle qui annonce 21 heures et tant sur scène que dans la salle, le sourire est général et amusé ; de même que le chef s’amuse du doux roucoulement d’un oiseau et fait mine de lui donner le départ, comme s’il faisait partie de l’orchestre. Ce bref moment de détente permet à chacun de prendre une respiration bienvenue au milieu de l’interprétation d’une partition terrible dont le dernier mouvement, avec les interventions majestueuses de l’orgue, sonne tel un roulement de tambours en marche.
C’est un concert somptueux que nous ont offert l’orchestre Les Siècles et François Xavier Roth visiblement survoltés. L’interprétation du concerto N°2 pour violoncelle a été si bien accueillie que l’ensemble des interprètes ont interprété un extrait du 1er concerto pour violoncelle composé en 1872 (création en janvier 1873). Il est moins virtuose que son « petit frère » mais tout aussi ardu. Comme pour se jouer de la fatigue, le second bis concédé par l’orchestre après la symphonie, n’est autre que la bacchanale extraite de Samson et Dalila (donné aux chorégies d’Orange il y a quelque jours) dont l’interprétation endiablée aurait pu poussé les danseurs dans leurs derniers retranchements. On ne peut que saluer la performance superbe des Siècles et de son chef qui étaient en grande forme malgré la difficulté d’un programme riche, dense et très inspirant pour les artistes ; en grande forme également la jeune violoncelliste Sol Gabetta, dont la carrière n’a rien à envier aux meilleurs, et Daniel Roth qui a maîtrisé le « petit » orgue de l’orchestre avec maestria.
Compte rendu, concert. Chambord. Cour du château, le 15 juillet 2021. Camille Saint Saëns (1835-1921) : danse macabre, suite symphonique en sol mineur opus 40 ; concerto N°2 pour violoncelle et orchestre en ré mineur opus 119 ; symphonie N°3 avec orgue en ut mineur opus 78. Bis : concerto pour violoncelle et orchestre N°1 (extrait) ; Samson et Dalila (bachanale). Sol Gabetta, violoncelle ; Daniel Roth, orgue ; orchestre Les Siècles. François Xavier Roth, dierction.
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