Vanda, opéra de poche : une sortie de résidence surprenante à l’abbaye aux dames de Saintes



Je vous ai déjà parlé des sorties de résidences qui se déroulent à l’abbaye aux dames de Saintes car j’ai assisté à plusieurs d’entre elles en 2023 ; dont celle de l’ensemble Aïgal en décembre dernier (https://lyriqueinfo.blogspot.com/2023/12/une-sortie-de-residence-originale.html). Cette initiative de l’équipe en place depuis 2021 permet à de jeunes talents de peaufiner qui un spectacle, qui un enregistrement de CD à venir, qui la mise en place de programmes destinés à tourner ... Les résidences durent cinq à six jours et se terminent par une sortie de résidence publique d’une heure environ. En avril c’est le compositeur Lionel Ginoux qui est venu avec la jeune et séduisante mezzo soprano Fanny Lustaud et la violiste Marie Suzanne de Loye. En effet les trois compères ont travaillé sur une œuvre de Lionel Ginoux : Vanda, opéra de poche. Ce monologue composé pour mezzo soprano, viole de gambe et viole électrique fera l’objet d’un enregistrement autour de la mi mai et ces quelques jours de résidence ont permis au trio de travailler sur cette œuvre étonnante.


Dès le début de la soirée j’ai pensé à La voix humaine de Francis Poulenc (1899-1963) est un monologue de 40 minutes. Si Poulenc a composé son chef d’œuvre pour soprano et orchestre, Lionel Ginoux, lui, a composé son monologue pour mezzo soprano, viole de gambe et viole électronique. En voyant écrit dans le programme de salle viole de gambe et « musique électronique » j’avoue m’être inquiété car c’est un style de musique dont je ne suis vraiment pas fan. Mais le « mélange » des deux violes, celle de gambe et l’électronique passe remarquablement bien pendant toute la soirée, la musique électronique étant très discrète ; Lionel Ginoux « manipule » son ordinateur et sa table de mixage avec dextérité sans jamais forcer le trait. Tout est réfléchi et parfaitement dosé, tant dans la musique électronique que dans les sons accompagnant le long lamento de Vanda. Je n’en ferai certes pas ma musique de chevet, mais elle mérite une réelle attention de la part des amateurs chevronnés de musique contemporaine. Le personnage de Vanda est interprété avec talent par la jeune et séduisante mezzo Fanny Lestud. La tessiture ample du personnage correspond parfaitement à la jeune femme qui passe aisément du médium aux graves et aux aigus avec une aisance déconcertante. Si la voix est très belle et parfaitement maîtrisée, je regrette que le texte de Siméon nous parvienne si peu audible en fond de salle. L’excellente violiste Marie Suzanne de Loye accompagne Fanny Lestud et Lionel Ginoux avec talent. L’emploi de la viole de gambe, instrument que l’on retrouve généralement dans la musique ancienne et la musique baroque, surprend au départ mais pour accompagner ce monologue il va finalement assez bien.


S’il y a quelques petites longueurs, Vanda, opéra de poche dure quand même une bonne heure, est un monologue à découvrir. Et la résidence de ces trois beaux artistes leur a permis de jeter les bases de l’enregistrement à venir – mi mai à Marseille – et de se (re)mettre dans l’ambiance assez sombre du chef d’œuvre de Jean Pierre Siméon qui a servi de base à ce monologue peu orthodoxe. Le seul gros reproche que je ferais concernant cette soirée c’est le départ bruyant et totalement irrespectueux des artistes de plusieurs personnes du public qui ont oublié que trois personnes ont travaillé dur pour (re)monter l’œuvre de Lionel Ginoux.


CR, concert. Saintes. Abbaye aux dames – auditorium ; le 16 avril 2024. Lionel Ginoux (né en 1978) : Vanda, opéra de poche d’après « Le testament de Vanda » de Jean Pierre Siméon (né en 1950). Fanny Lustaud, mezzo soprano ; Marie Suzanne de Loye, viole de gambe ; Lionel Ginoux, composition et viole électronique.


Crédit photo : Michel Rubinel

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