François Chaignaud et Nino Laisné enflamment A Corps avec Romances Inciertos.


Chaque année fin mars ou début avril le festival A corps envahit le TAP et les locaux de ses partenaires que sont l'Université de Poitiers et le centre culturel de Beaulieu. L'édition 2019 d'A corps se terminera vendredi soir après une semaine très dense. En général, ce festival de danse contemporaine réserve son lot de surprises ; comme il y a plusieurs spectacles en même temps et toute la journée, il règne une ambiance festive. Romances inciertos, le nouveau spectacle de danse de François Chaignaud, associé cette année à Nino Laisné, fait partie de ces pépites qui scotchent des salles entières et à juste titre tant le travail de recherche et de préparation en amont a été long et sans concessions quant à la conception du danseur de son travail.

François Chaignaud vient régulièrement au Théâtre Auditorium, et chaque fois il propose des spectacles d'une très grande qualité. Romances Inciertos ne fait pas exception quant à la qualité et au niveau recherché; les costumes, les décors, la diction ont été étudiés sous toutes leurs coutures. La «pièce» est découpée en quatre tableaux aussi différents que possible les uns des autres mais tous les quatre magnifiques. D'entrée de jeu on ne peut qu'être séduits par l'élégance de François Chaignaud qui endosse successivement les costumes de Don Quichotte, d'un derviche et d'une danseuse de flamenco. Le talent et la force de Chaignaud tiennent à sa capacité de danser et de chanter en même temps, même dans les positions les plus improbables. J'ai également apprécié la diction quasi parfaite du danseur qui pour ce spectacle est aussi chanteur. Le répertoire choisi pour Romances Inciertos va du madrigal au tango en passant par la zarzuela*, la musique religieuse, la romance … Autant de styles très différents mais qui s'intègrent parfaitement au spectacle tel qu'il a été conçu par François Chaignaud et Nino Laisné. C'est le second tableau, celui du «derviche tourneur» qui surprend le plus tant François Chaignaud fait merveille avec les mini échasses sur lesquelles il est juché pendant presque tout le tableau ; ce sont les musiciens qui quittent leurs sièges pour aider le danseur à s'en défaire pour la fin du tableau. Pour permettre à François Chaignaud de récupérer un peu, de se changer et de quitter les coulisses pour le quatrième et dernier tableau. Pour ce tableau, François Chaignaud entre par le haut de la salle. Le public a donc le plaisir de voir de près ce formidable artiste vêtu et maquillé comme une danseuse de flamenco ; ce privilège est rarissime et donc très appréciable. Là encore, François Chaignaud séduit son public par une performance remarquable ; les échasses du second tableau sont remplacées par des chaussures à talons hauts, chaussures que le danseur utilise avec un talent inégalable, comme s'il portait un tel accessoire tous les jours. On notera aussi que le danseur surprend le premier rang en sautant de la scène et en faisant participer cette rangée, le temps de quelques secondes.

A la fin du spectacle, la réaction du public ne se fait pas attendre. C'est toute la salle, sept cent personnes, qui se lève et réserve une longue ovation à tous les artistes, à commencer par un François Chaignaud visiblement ravi de l'accueil qu'il reçoit. Romances Inciertos est sans aucun doute un spectacle qui entrera dans les anales du festival A corps tant par sa qualité, que par l'accueil qu'il a reçu de la part d'un public conquis.

Compte rendu, concert. Poitiers. Théâtre, le 8 avril 2019. François Chaignaud, conception, chorégraphie, danse et chant ; Jean Baptiste Henry, Bandonéon ; Robin Pharo, violes de gambe ; Pablo Zapico, théorbe, guitare baroque ; Pere Olivé, percussions historiques et traditionnelles ; Nino Laisné, conception, mise en scène et direction musicale.

*Zarzuela : opérette espagnole

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