Entre Allemagne et Tchécoslovaquie : L'Orchestre de Chambre Nouvelle Aquitaine revient avec un programme romantique et deux jeunes solistes plein de talent.


En ces premiers jours de printemps, l'Orchestre de Chambre Nouvelle Aquitaine entame sa nouvelle tournée dans l'ex région Poitou Charentes au Théâtre Auditorium de Poitiers. Pour l'occasion l’inca a invité le chef chinois Xu Zhong et deux jeunes et brillants solistes : Pierre Fouchenneret et Victor Julien-Laferrière. Le programme de la tournée vaut le déplacement, ne fusse que pour la huitième symphonie de Dvorák moins connue que la symphonie du «nouveau monde» et dont, pourtant, la musique est aussi belle et inventive que sa glorieuse «petite sœur». Pour ce concert de l'ONCA, j'ai apprécié de voir autant d'enfants et d'adolescents dans la salle ; les instituteurs et les professeurs d'éducation musicale ont choisi d'emmener leurs élèves à un concert de très belle tenue. «Mon fils est en CM2, et c'est lui qui m'a entraînée à ce concert auquel il venait avec sa classe.» nous dit une professeure d'université. «Notre but est d'emmener les enfants à de telles soirées. Pour qu'ils sortent de leur zone de confort.» ajoute un professeur d'éducation musicale venu de Gençay avec une classe de 6e. Si, bien sûr, la soirée a été préparée en amont, certains enfants sont décontenancés en découvrant en salle une musique qu'ils n'ont pas toujours l'occasion d'écouter chez eux.

Pour débuter la soirée, l'Orchestre de Chambre Nouvelle Aquitaine joue deux danses hongroises sur les vingt-et-une composées par Johannes Brahms (1833-1897). Si la cinquième danse est devenu un tube universel tant elle a été jouée et rejouée, tant au piano (on rappellera au passage la très belle version au CD de Jean François Heisser et Marie Josèphe Jude) qu'à l'orchestre, la sixième est charmante. Si j'apprécie la direction claire, nette, dynamique et précise de Xu Zhong, je serais tentée de lui reprocher une fâcheuse tendance à oublier les nuances. Ce défaut est plus audible dans le double concerto pour violon et violoncelle ; pour cette œuvre, l'OCNA a invité Pierre Fouchenneret et Victor Julien-Laferrière, deux jeunes et brillants solistes révélés au début des années 2000. Et, surtout dans le premier mouvement, on entend un orchestre qui joue parfois trop fort couvrant ainsi les deux solistes dont, par ailleurs, le violon et le violoncelle dialoguent brillamment. Victor Julien-Laferrière, violoncelliste de grand talent, fait résonner son violoncelle dans l'auditorium avec brio en réponse au chant joyeux du violon de Pierre Fouchernneret. On notera, au milieu de ce flot de musique l'andante serein et très reposant dirigé de main de maître par Xu Zhong. Le public qui a apprécié la très belle performance des deux jeunes solistes leur réserve un accueil très chaleureux ; sensibles à ce beau succès, les jeunes gens concèdent en bis, l'interprétation d'une passacaille de Jean Sébastien Bach (1685-1750). Passacaille fort bien servie par deux solistes sur-motivés par un public enthousiaste et chaleureux.

Au retour de l'entracte, le plateau a légèrement changé pour permettre à l'OCNA d’interpréter la symphonie N°8 en sol majeur «tchécoslovaque» d'Antonin Dvorák (1841-1904). Si là aussi je regrette que le chef oublie parfois de faire des nuances, notamment dans les passages rapides, je tiens quand même à saluer une direction ferme, nette et sans faiblesse. Xu Zhong a bien saisi la complexité d'une musique enjouée, vive, dense et très bien construite par un Dvorák très inspiré. Si cette symphonie a été éclipsée par sa glorieuse petite sœur, la célèbre symphonie N°9 «du nouveau monde», elle n'en a pas moins sa place dans tout programme symphonique digne de ce nom. On appréciera aussi que, malgré une interprétation pas toujours parfaite mais quand même de très belle tenue, la «Tchécoslovaque» sorte de l'ombre.

Si on peut regretter que le chef ait une direction parfois tonitruante, on ne peut que se réjouir de voir dans une même soirée interpréter des œuvres peu connues, comme la «Tchécoslovaque», côtoyer des «tubes» comme les danses hongroises. Et d’ailleurs, pour remercier le public de l'accueil reçu, le chef fait rejouer en bis la danse hongroise N°6. La présence de tant d'élèves d'âges divers est d'autant plus réjouissante que ces enfants n'ont pas toujours l'occasion d'aller au Théâtre que ce soit pour y voir des pièces de théâtre ou des concerts de musique classique.

Compte rendu, concert. Poitiers. Auditorium, le 28 mars 2019. Johannes Brahms (1833-1897) : danses hongroises (danses N°5 et 6), double concerto pour violon et violoncelle en la mineur opus 102 ; Antonin Dvorak (1841-1904) : symphonie N°8 en sol majeur «Tchécoslovaque» ; bis : Jean Sébastien Bach (1685-1750) : passacaille ; Johannes Brahms (1833-1897) : danse hongroise N°6. Pierre Fouchenneret, violon ; Victor Julien-Laferrière, violoncelle ; Orchestre de Chambre Nouvelle Aquitaine. Xu Zhong, direction.

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