L'Orchestre de Chambre de Nouvelle Aquitaine revient au Théâtre Auditorium de Poitiers
Pour
leur premier concert de l'année 2019 au Théâtre Auditorium de
Poitiers, l'Orchestre de Chambre de Nouvelle Aquitaine et Jean
François Heisser ont placé cette soirée sous le signe de la
jeunesse et du talent. En invitant les élèves des deux pôles
d'enseignement supérieurs de la région Nouvelle Aquitaine,
l'Orchestre de Chambre Nouvelle Aquitaine, le temps d'une soirée,
est devenu l'Orchestre Inter-pôles Nouvelle Aquitaine. La présence
de deux jeunes artistes au talent inégalable, le pianiste Philippe
Hattat (26 ans), un ancien élève de Jean François Heisser, et le
clarinettiste Raphaël Sévère (25 ans) élève encore un niveau
déjà exceptionnel. Avec Carl Maria Von Weber (1786-1826) et Franz
Schubert (1797-1828) l'OINA a programmé deux compositeurs
contemporains morts jeunes l'un et l'autre mais dont le corpus
d'essence pré-romantique est divers, varié et régulièrement donné
en concert ou en récital. En programmant également Olivier Messiaen
(1908-1992), Jean François Heisser fait sortir les jeunes musiciens
des deux pôles d'enseignement supérieurs de la région Nouvelle
Aquitaine d'une certaine zone de confort.
Pour
débuter la soirée, c'est donc le concerto N°1 pour clarinette et
orchestre de Weber que l'OINA propose au public avec comme soliste le
jeune prodige français de la clarinette Raphaël Sévère. La
tendresse qu'il a pour Weber est d'autant plus forte «qu'il est
éclipsé par Beethoven alors que sa musique, surtout dans le
concerto que je joue ce soir, est pleine de vie, forte, dynamique.».
La présence de jeunes musiciens en fin de cycle au sein de l'OCNA ne
change rien à la direction claire, nette, précise, rigoureuse de
Jean François Heisser qui attend et obtient de ces jeunes gens un
niveau élevé. Raphaël Sévère joue sans partition ce qui est
d'autant plus remarquable que la musique de Weber est peu évidente à
jouer ; le jeune clarinettiste se joue des difficultés de la
partition avec une virtuosité quasi surnaturelle. Le dialogue
Cors/clarinette du second mouvement résonne dans l'auditorium avec
d'autant plus de force que le travail effectué en amont a permis de
ciseler chaque note d'un passage qui dure trois ou quatre minutes. Si
Raphaël Sévère relève brillamment le défi que constitue le
concerto pour clarinette, le jeune pianiste Philippe Hattat donne à
entendre d'excellentes choses dans «Les oiseaux exotiques» le chef
d’œuvre d'Olivier Messiaen (1908-1992). Composée fin 1955 pour
ensemble instrumental et piano et créée en mars 1956 par l'épouse
de Messiaen lui même, l’œuvre a, une fois de plus, pour thème
les oiseaux, qui ont littéralement fasciné le compositeur pendant
toute sa vie.
Quittant
la douce quiétude ou le chef d’œuvre de Weber l'avait entraîné,
le public se retrouve sans coup férir au cœur de la forêt
amazonienne. Le joyeux vacarme des oiseaux de la dense et profonde
forêt amazonienne, éclate aux oreilles d'un public surpris et
attentif tant à la musique de l'orchestre réduit à la seule
formation vents et bois accompagnée de xylophones et d'un gong,
qu'au jeu de Philippe Habitat qui prend visiblement un véritable
plaisir à jouer sous la direction de son maître. Pour remercier le
public du chaleureux accueil qu'il leur a réservé, Raphaël Sévère
et Philippe Hattat reviennent aussitôt sur scène pour donner en bis
le finale d'une sonate pour clarinette et piano de Johannes Brahms
(1833-1897). Les deux jeunes gens, aussi brillants l'un que l'autre,
souhaitaient «préparer une surprise pour le public» comme me le
disait Raphaël Sévère dans l'après midi. Ils interprètent le
finale de cette sonate avec brio et vaillance d'autant que les deux
œuvres qu'ils ont interprétées auparavant étaient terriblement
exigeantes. Brahms n'aurait en tout cas pas renié des interprètes
aussi jeunes et talentueux qui lui ont si parfaitement rendu justice.
Après
un nouveau changement de plateau qui permet aux cordes de revenir sur
scène, Jean François Heisser revient pour diriger la symphonie N°3
de Frantz Schubert (1797-1828). Chef polyvalent, Jean François
Heisser prend le chef d’œuvre de Schubert à bras le corps. La
battue est claire, nette, précise et les musiciens suivent avec une
précision millimétrée un chef visiblement très inspiré. La
symphonie de Schubert est d'autant plus difficile à interpréter que
l’œuvre n'est pas forcément très longue mais dense et tendue ;
les quatre mouvements de cette troisième symphonie racontent chacun
une courte tranche de vie , comme si Schubert avait compris qu'il
était destiné lui même à avoir une vie brève et intense.
L'orchestre
de Chambre Nouvelle Aquitaine associé aux étudiants des deux pôles
d'enseignement supérieurs de Nouvelle Aquitaine a donné en ce
mercredi soir un concert haut en couleurs avec des œuvres denses,
exigeantes et très fortes. En invitant deux solistes jeunes et
surdoués, Philippe Hattat et Raphaël Sévère, Jean François
Heisser a élevé un niveau déjà remarquable à des sommets
exceptionnels. Les jeunes musiciens invités à jouer au sein de
l'orchestre se sont parfaitement intégrés à la phalange et se sont
montrés dignes de la confiance que leur a accordée Jean François
Heisser.
Compte
rendu, concert. Poitiers. Auditorium, le 6 mars 2019. Carl Maria Von
Weber (1786-1826) : concerto N°1 pour clarinette et orchestre Op73 ;
Olivier Messiaen (1908-1992) : Les oiseaux exotiques ; Franz Schubert
(1797-1828) : Symphonie N°3 ; Johannes Brahms (1833-1897) : Sonate
pour clarinette et piano (finale) bis. Raphaël Sévère,
clarinette ; Philippe Hattat, piano. Orchestre Interpôles
Nouvelles Aquitaine ; Jean François Heisser, direction.
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