Théâtre Auditorium de Poitiers : L'Orchestre des Champs Elysées, le Collegium Vocal Gent et Phillippe Herreweghe offrent un Haydn d'anthologie à leur public
Depuis
la création de l'Orchestre des Champs Elysées en 1992, Philippe
Herreweghe a dirigé, en salle ou en studio, de nombreux oratorios. «
Die Schöpfung » de Joseph Haydn (1732-1809) ne fait pas exception.
Comme de bien entendu, le collegium Vocal Gent, l'ensemble historique
de Philippe Herreweghe, était présent sur la scène de l'auditorium
avec un trio de solistes de très belle tenue. Le concert de
Poitiers était le premier d'une tournée européenne qui emmènera
l'ensemble des artistes en France, en Italie et en Pologne.
Visiblement très en forme, Philippe Herreweghe a entamé la soirée
par une présentation du chef d'oeuvre de Haydn assortie de quelques
traits d'humour belge qui ont fait mouche auprès du public.
Composée
en 1800 par un Joseph Haydn très inspiré par le sujet, Die
Schöpfung relate la création par Dieu de toute vie sur terre, dans
la mer et dans le ciel. Dès le début du concert Philippe
Herreweghe donne le ton de la soirée ; la direction est
nerveuse, claire, nette, précise, sans temps mort. L'introduction
instrumentale parfaitement interprétée par un Orchestre des
Champs Elysées visiblement très en forme plonge le public, venu
nombreux, dans une ambiance sobre et intimiste. La phalange
accompagne le choeur et les solistes avec une belle simplicité ; les
nuances et les tempos sont idéaux, mais c'est surtout le Collegium
Vocale Gent, fidèle à son excellente réputation, qui
interprète une partition difficile avec un panache inégalable ;
tout y est : voix saines solides, tessitures larges, diction
impeccable, nuances parfaites. Et l'on ne peut que saluer l'énorme
travail réalisé en amont pour parvenir au niveau d'excellence qui
est celui de cet ensemble bien connu du public poitevin. Pour une
œuvre aussi difficile que La création on ne peut attendre que des
solistes de haut niveau, et nous ne sommes pas déçus. Ainsi Mari
Erickson séduit avec sa belle
voix de soprano ; si nous apprécions une voix large et parfaitement
maîtrisée, des nuances de toutes beauté, des vocalises idéales,
une diction parfaite, nous regrettons une gestuelle quelque peu
excessive et, nous semble-t-il, inutile. Cela étant dit, on ne peut
qu'admirer le professionnalisme de la jeune femme qui se sert
rarement de sa partition posée sur un pupitre. Patrick
Grahl possède une fort belle
voix de ténor mais se trouve plutôt désavantagé par la première
partie ou il ne chante guère que des récitatifs ou des ensembles ;
c'est dans la troisième partie de l'oratorio que Grahl a la
possibilité de se mettre en valeur avec des airs plus ornementés.
Mais le grand triomphateur de la soirée est sans contestation
possible Florian Boesch
dont la belle et solide voix de baryton envahit l'espace de
l'auditorium sans effort. Chaque récitatif, chaque air, chaque
ensemble est interprété avec une autorité peu commune et nous
apprécions d'écouter un artiste aussi accompli dans une œuvre
certes complexe mais qui réserve de très belles pages aux solistes.
C'est
sans doute l'un des plus beaux concerts de l'Orchestre des Champs
Elysées qu'il nous a été donné d'écouter au Théâtre Auditorium
de Poitiers tant chacun, orchestre, choeur, solistes, chef était
survolté par le chef d'oeuvre de Haydn. Le public, dans lequel on
voyait, une fois de plus, plusieurs enfants ne s'y est pas trompé en
réversant à tous les artistes présents sur scène un triomphe
grandement mérité.
CR,
concert. Poitiers. Auditorium, le 31 janvier 2020. Joseph
Haydn (1732-1809) : Die Schöpfung. Mari
Eriksmoen, soprano ; Patrick
Grahl, ténor ; Florian
Boesch, baryton ; Collegium
Vocale Gent ; Orchestre
des Champs Elysées. Philippe
Herreweghe, direction.
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