L'ensemble Correspondances en fer de lance du début d'année au Théâtre Auditorium de Poitiers


Après deux semaines de congés bien mérités, le Théâtre Auditorium de Poitiers revient en forçe, en ce début d'année 2020, avec un concert de l'ensemble Correspondances fondé et dirigé par le jeune chef Sébastien Daucé ; pour l'occasion il a invité la très belle alto Lucile Richardot et le baryton basse René Ramos-Premier très en voix. Le concert, doublé d'une pièce de théâtre jouée par deux comédieennes, rejointes parfois par les musiciens et les deux solistes, tourne autour du CD « Perpetual nigth » paru en 2018. Si Sébastien Daucé et Samuel Achache ont eu les meilleures intentions du monde en voulant présenter un récital à part, on peut se demander, au vu du résultat, si c'était une bonne idée tant la partie théâtrale pose question. Cela étant dit la présence sur la scène du TAP de l'ensemble Correspondances est d'autant plus remarquable que Sébastien Daucé, le chef et fondateur, de l'ensemble a recruté des musiciens exceptionnels qui se sont montrés à la hauteur du défi qui leur était lancé.

La « pièce de théâtre » : Une jeune femme sur le point de se marier s'enferme dans les toilettes de la salle de réception choisie pour son mariage afin de tenter de chasser la peur panique qu'elle ressent en ce jour un peu particulier. La soirée débute toutes lumières allumées car l'une des comédiennes, Sylvia, et l'un des musiciens entrent par la salle et les premières scènes se déroulent « en plein jour ». Ces scènes alternant dialogues et souvenirs, narrés par l'une ou l'autre des comédiennes, posent questions et si la suite nous fait parfois sourire, elle nous laisse souvent sceptique au point qu'on se demande ou les auteurs de cette « pièce » veulent en venir tant le sujet, un mariage plus ou moins raté, n'a rien à voir avec le thème général du récital, tiré rappelons le, du CD de l'ensemble Correspondances « Perpetual nigth » paru en 2018 sous le label Harmonia Mundi. Samuel Achache, en charge de la mise en scène a certes de très bonnes intentions, mais aucune des idées esquissées ne va au bout ; et au final, le soufflé retombe régulièrement. Il fait de Lilianne une hystérique peu encline à la mansuétude tant vis à vis de sa sœur Sylvia, la mariée apeurée, que vis à vis des musiciens qu'elle traite parfois fort mal ce qui a tendance à nous mettre plutôt mal à l'aise.

Le récital : Pour leur album « Perpetual Night », Sébastien Daucé et l'ensemble Correspondances se sont intéressés à la musique baroque anglaise. Pays très actif au XVIIe siècle quant à la culture, l'Angleterre a donné à a postérité de très belles pages tant de musique instrumentale que de musique vocale que Lucile Richardot et René Ramos-Premier défendent avec talent ; nous regrettons cependant une mise en scène parfois ridicule qui ne les aide vraiment pas. Musicalement, nous apprécions la totale implication des musiciens qui interprètent les musiques choisies pour ce programme sans jamais en faire trop ; Sébastien Daucé dirige depuis l'orgue avec une parfaite sûreté de métier une musique qui l'inspire visiblement beaucoup. Côté voix, c'est la très belle alto Lucile Richardot qui interprète la plupart des chansons sélectionnées pour le récital ; Tout y est pour séduire le public : ligne de chant impeccable, médiums séduisants, graves parfaitement assurés, aigus pércutants, diction idéale. Si on peut regretter que Samuel Achache fasse de cette si belle artiste une poivrote dans ses premières interventions nous apprécions la présence sur scène de Lucile Richardot qui mériterait grandement d'être mieux mise en avant. Si nous entendons assez peu le baryton-basse René Ramos-Premier, il ne chante qu'une mélodie avant d'interpréter, avec Lucile Richardot, quelques extraits d'Orphée (celui de Monteverdi traduit ?) ; extraits dans lesquels il incarne un Pluton de fort belle tenue et qui nous permettent d'apprécier une voix saine, solide et parfaitement maîtrisée. Fort heureusement, Samuel Achache a la bonne idée de lui donner un rôle muet qui lui permet de ne pas se faire oublier.

Nous avons assisté en ce froid mardi soir à un théâtre-concert qui nous a quelque peu laissé sur notre faim. Si la partie instrumentale et vocale est quasi parfaite, interprétée par un ensemble Correspondances en grande forme et deux solistes très en voix, la partie théâtrale, elle, nous laisse dubitatifs. Et les deux comédiennes, Margot Alexandre et Sarah Le Picard, défendent au mieux une « pièce » ou elles n'ont pas forcément le beau rôle.

Compte rendu, concert. Poitiers. Théâtre, le 8 janvier 2020. Songs : musiques de la période baroque du XVIIe siècle anglais. Lucile Richardot, alto ; René Ramos-Premier, baryton basse ; Lucile Perret, flûtes ; Angélique Mauillon, harpe ; Mathilde Vialle, viole ; Louise Bouedo, viole ; Etienne Floutier, viole ; Thibaut Roussel, théorbe et guitare ; Arnaud Pasqual, virginal ; Ensemble Correspondances ; Sébastien Daucé, orgue, virginal et direction. Margot Alexandre, comédienne ; Sarah Le Picard, comédienne et scénographie ; Samuel Achache, mise en scène ; Lisa Navarro, scénographie ; Pauline Kieffer, costumes ; César Godeffroy, lumières ; Carla Bouis, assistante metteur en scène.

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