Lionel Meunier : de la trompette au chant un parcours sous le signe de la renaissance et de la musique baroque
Installés
à Saintes pour quelques jours, à l'occasion du festival, nous
rencontrons plusieurs chefs et artistes invités pour une édition
2016 riche en surprises et en émotions. En ce début de festival,
c'est Lionel Meunier, le directeur artistique de l'ensemble Vox
Luminis, que nous rencontrons pour une entrevue riche en
enseignements.
Une
carrière frappée au sceau du chant
Je
viens d'une famille de non musiciens où seul mon père est mélomane.
Dans ma ville de naissance j'ai suivi, outre des cours de solfège,
des cours de trompette puis de flûte à bec, au grand dam d’ailleurs
de mes sœurs qui étudiaient le même instrument avec un peu moins
de facilité. Comme j'avais fait de la trompette mes première
expériences en ensemble furent l’Harmonie de ma ville puis un Big
Band dirigé par Denis Dupont (mon professeur de trompette).» nous
dit il avant de poursuivre : «Ma rencontre et le travail avec Hugo
Reyne a été déterminante;alors que j’étais au collège puis au
Lycée. A ce moment là le chant ne m'intéressait absolument pas et
je ne m'imaginais vraiment pas faire carrière en tant que chanteur.
Quand je suis arrivé à Namur, j'avais 18 ans et j'avais passé on
baccalauréat (S) pour rassurer mes parents mais aussi avoir un «plan
B». Après un stage je leur ai annoncé que je souhaitais intégrer
l’IMEP de Namur (Institut Supérieur de Musique et de Pédagogie)
en leur disant également que c'était non négociable. Je voulais
faire de la musique mon métier sans pour autant avoir de plan de
carrière pré-défini en effet je voulais simplement devenir
professeur de flûte à bec! A Namur, l'étude du chant était
obligatoire et j'ai eu l'occasion de me faire un peu de souci; je
n'avais jamais étudié le chant et je ne connaissais ni mon
potentiel ni même ma tessiture. Après quelques journées en ténor
et baryton, j'ai chanté comme basse et le déclic s'est fait à ce
moment là. Non seulement je me suis aperçu que j'adorais chanter,
mais j'ai aussi réalisé que chanter en choeur me faisais revivre
des sensations d’ensemble connu avec la trompette. Pendant mes
années à l’IMEP , j’ai débuté mes études de chant et j'ai
intégré le choeur mondial des jeunes. C'est à cette époque que
je me suis lié d'amitié avec plusieurs jeunes chanteurs qui avaient
intégré cette institution à peu près en même temps que moi. Le
destin nous a permis de nous retrouver assez vite après notre sortie
du Choeur mondial des jeunes.»
La
création de Vox Luminis
Sorti
du Choeur mondial des jeunes, Lionel Meunier se lance dans une
carrière qu'il n'envisgeait pas vraiment au départ : «Au début de
mes études je détestais le chant, ça ne m'intéressait pas et je
n'écoutais même pas de musique vocale.» nous dit il à plusieurs
reprises. Son passage à Namur lui a ouvert des perspectives
surprenantes; désormais prêt à ne faire que du chant, Lionel
Meunier se passionne pour la musique ancienne et la musique baroque.
«Quand j'ai envisagé de fonder mon propre ensemble j'en étais le
premier surpris; et quand j'en ai parlé autour de moi, tous les
chanteurs, ceux que j'avais rencontré à Namur, m'ont encouragé et
m'ont dit, vas y, on te suit. Vox Luminis est né ainsi et c'est
d'abord une belle histoire d'amitié avant d'être une aventure
musicale.» nous dit Lionel Meunier encore surpris du succès de ce
groupe constitué d'amis : «Le succès a été assez rapide et nous
en sommes les premiers surpris. Au début je faisais tout moi même
et depuis 2,3 ans je commence à m'entourer afin d’être déchargé
des parties administrative et me concentrer un peu plus sur la
musique, la programmation, les répétitions.» Et d'ajouter : «Nous
sommes très sollicités; c'est au point que nous nous limitons à
une soixantaine de concerts par an (!) nous sommes conscients de la
chance que nous avons alors que tant d'autres ensembles ou orchestres
peinent à arriver à un tel stade nécessaire pour pouvoir gagner
leur vie.» Actuellement en résidence en Belgique, Vox Luminis
sillonne désormais la France, l’Europe et même l'Amérique,
envisageant même d'aller vers des contrées que cette bande d'amis
n'a pas encore visitées.
King
Arthur
Ce
semi opéra, composé en 1691par Henry Purcell (1626-1695) pour
servir de support à la pièce éponyme, a connu un succès immédiat.
Lionel Meunier, curieux de tout nous dit à ce sujet : «La première
production de King Arthur à laquelle nous avons participé était
montée au Palais des Bozar à Bruxelles en collaboration avec la
Fenice de Jean Tubéry. Nous y avons pris un réel plaisir et, même
s'il y a encore beaucoup à faire dans la musique vocale,hors opéra,
cela nous a ouvert de nouvelles perspectives. Nous avons donc créé
notre propre version de King Arthurcomme d’habitude sans chef. Mais
au lieu d'intégrer la musique à la pièce, ce qui donne un
spectacle de quatre heures voir plus!, j'ai demandé à ma dramaturge
d'écrire un texte d'une vingtaine de minutes qui s'intègre à la
musique sans pour autant trahir la pièce.». Le jeune chef conclut
ainsi : «Quand Stephan (Maciewjeski, le directeur artistique du
festival de Saintes) m’aentendu parler de notre version de King
Arthur, il m'a dit : «C'est un concert d'ouverture de festival,
ça.». Ah ! Bon. Nous venons toujours avec plaisir à Saintes, et
présenter King Arthur en ouverture du festival est un honneur.»
Des
projets plein les tiroirs
Si
King Arthur a du succès, Vox Luminis ne s'éloigne jamais vraiment
de son répertoire de prédilection : «A la fin de cette année
sortira notre premier CD consacré aux cantates de jeunesse de Bach
dont l’Abbaye aux Dames avait eu la primeur il y a 2 ans. Nous
venons d’enregistrer un double CD chez Ricercar consacré à la
musique de la Réforme pour célébrer les 500 ans en 2017retrouvant
au passage notre très cher Heinrich Schütz et beaucoup d’autres.
2017 nous verras aussi retourner au répertoire anglais et aussi
notre premier enregistrement avec l’orchestre maison». Le virus de
l'opéra injecté par King Arthur à Vox Luminis leur a donné des
idées : «En 2019 nous allons monter l'Orfeo de Monteverdi et nous
allons reprendre La descente d’Orphée aux enfers qui est à notre
répertoire depuis 2015 avec toujours Reinoud Van Mechelen dans le
rôle titre. Enfin la suite logique du King Arthur devait nous amener
à aborder the Fairy queen». Ceci étant dit, Lionel Meunier a des
idées et des projets plein la tête : «Nous allons également
développer des collaborations avec des ensembles ou orchestres comme
l'Achéron, le Frieburger Orchester et l'Academy of Ancient Music.
Nous allons aussi explorer de nouveaux pays tels que le Brésil, la
Corée, la Chine dans les 18 prochains mois mais aussi nos activités
pédagogiques.»
L'enthousiasme
de Lionel Meunier, son amour pour la musique vocale qu'il n'aimait
pourtant pas à ses débuts sont les fils conducteurs d'une carrière
marquée au sceau de la musique ancienne et baroque. Les projets
multiples de ce jeune chef dynamique et ambitieux laisse augurer de
beaux jours pour Vox Luminis que nous espérons revoir très bientôt
à Saintes ou ailleurs.
Depuis 2016, Lionel Meunier et Vox Luminis ont continué leur chemin et rencontrent toujours un tel succès qu'ils limitent toujours le nombre de leurs concerts à soixante par an. Fidèles au festival de Saintes ou ils se produisent régulièrement.
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